Le 8-Mars ou Journée internationale des droits des femmes, célébrée chaque année au Burkina Faso et à travers le monde. Cette journée est l’occasion de mettre en lumière les luttes et les revendications des femmes pour l’égalité des sexes, mais aussi de célébrer les réalisations des femmes dans tous les domaines.
Au Burkina Faso, le 8-Mars est habituellement marqué par des manifestations de tous genres, notamment des conférences-débats, des loisirs ou des événements culturels mettant en avant la place et le rôle des femmes dans la société. Les femmes burkinabè profitent également de cette journée pour exprimer leurs revendications en matière d’égalité des sexes, de lutte contre les violences basées sur le genre, d’accès à l’éducation et à la santé, de leur participation politique,… Mais dans tout cela, le côté purement festif a souvent pris le dessus. Que pensent finalement les femmes burkinabè de cette journée? A quoi comptent-elles s’occuper en cette 167e édition? Quelle sera la place de leurs conjoints dans cette célébration? Nous avons donné la parole à des Ouagavilloises qui répondent à ces trois questions.
« Cette journée sera pour moi ordinaire en attendant de pouvoir vraiment fêter l’année prochaine », Madeleine Tebda, ménagère
« Jai l’habitude de le célébrer le 8-Mars mais pour cette année et depuis quelques années d’ailleurs, je ne peux pas fêter sachant que nos enfants, nos maris, nos pères sont sur le champ de bataille et risquent leur vie chaque jour que Dieu fait. Donc pour moi, cette journée sera ordinaire et j’espère que l’année prochaine nous pourrons vraiment la fêter avec la victoire des forces combattantes sur les terroristes. Je souhaite beaucoup de force et de courage à nos autorités pour qu’elles ramènent la paix. Mon mari va juste vaquer à ses occupations et moi au miens sans faire quoique se soit d’exceptionnelle.
« Que mon mari demeure l’homme, le chef de la famille », Delphine Nikiema, couturière
« Je ne suis pas enthousiaste au regard de tout ce qui se passe actuellement dans le pays. En tant que couturière, j’ai d’ailleurs remarqué que contrairement aux années précédentes, il y a moins de demandes de tenues pour cette célébration. Il faut dire que la vie est devenue très chère, les gens n’ont pas d’argent et l’insécurité entrave tout pratiquement. Concernant la place de mon mari dans cette célébration je ne suis pas de celles qui pensent que leur époux doit forcément accomplir les tâches domestiques lors des fêtes du 8-Mars. Que mon époux reste l’homme, le chef de famille. Je conseille d’ailleurs toutes celles qui ont prévu des célébrations à opter pour la sobriété, comme le préconise le chef de l’État ».
» Célébrer nos droits ne signifie pas nous comparer aux hommes dans le foyer », Ramata Sawadogo/Ouédraogo, commerçante
« Nous célébrons nos droits, mais cela ne signifie pas que nous devons nous comparer aux hommes dans le foyer. C’est une occasion pour nous d’exprimer notre savoir-faire et nos connaissances, et non de faire des fêtes grandioses, surtout dans le contexte actuel de notre pays. Au passage, je salue le choix du « koko dunda » et du « Faso dan fani » pour cette célébration qui nous remplit de joie. Cela permet de valoriser le travail de nos artisans de ce secteur d’activité qui occupe d’ailleurs de nombreuses femmes et de les aider à bénéficier des fruits de leur travail. Personnellement, je suis ravie de cette initiative.
« Consacrer cette journée à la réflexion sur l’autonomisation de la Femme », Nadège Yameogo, journaliste
« Il est vrai que tous les jours on peut et on doit rendre hommage à la femme mais je pense que c’est aussi important de consacrer cette journée à la réflexion autour des questions qui minent l’autonomisation de la femme surtout en Afrique. Parce que quoi qu’on dise il existe encore de nombreuses pesanteurs sociales qui entravent l’épanouissement de la femme. Il est inconcevable qu’au 21ème siècle des pratiques comme l’excision ou encore le mariage d’enfant existent encore sous nos cieux ! Pour moi cette journée doit être l’occasion de jeter un regard rétrospectif sur le chemin parcouru pour la reconnaissance des droits des femmes. Car des succès, il y en a eu à mon avis. Au 1er janvier 2023 on comptait 17 femmes Cheffes d’État dans le monde et 19 à la tête de gouvernements. C’est donc dire que de nombreuses victoires ont été engrangées. Mais tout en célébrant les victoires, cette célébration doit surtout être l’occasion d’envisager les perspectives adéquates pour un égal accès aux opportunités entre hommes et femmes. Je souhaite donc une bonne célébration du 8 mars à toutes les femmes du Burkina ».
Propos recueillis par Estelle Konkobo